samedi 14 mars 2015

Un dernier regard sur l’économie réelle avant qu’elle n’implose – Partie 1


Article original de Brandon Smith, publié le 4 mars 2015 sur le site www.altmarket.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr



Nous sommes seulement au deuxième mois de 2015, et cette année a déjà prouvé qu’elle serait la plus volatile économiquement parlant depuis 2008-2009. Nous avons vu les marchés pétroliers s’effondrer d’environ 50% en l’espace de quelques mois (au moment où la Réserve fédérale a annoncé la fin du QE3, méthode destinée à utiliser la monnaie fiduciaire pour cacher la baisse de la demande de biens), le Baltic Dry Index perdre 30% depuis le début de l’année, la surprise de la monnaie suisse, les Grecs qui menacent de sortir de l’UE (et maintenant les citoyens grecs menaçant de manifestations violentes le nouvel accord sur les quatre prochains mois), et les effets de la grève dans les ports de la côte Ouest des États-Unis qui dure depuis neuf mois et n’est pas encore réglée. Ce n’est pas seulement une expression fugace d’un premier trimestre négatif, c’est un signe de ce qui arrive.


Les marchés boursiers sont, bien sûr, une fois de plus au plus haut de tous les temps après un départ chancelant, malgré le fait que presque chaque indicateur fondamental soit au rouge clignotant. Mais, ZeroHedge l’a récemment souligné dans son article sur le dopage artificiel par les sociétés utilisant massivement des fonds pour le rachat de leurs propres actions, cela ne va pas durer beaucoup plus longtemps, simplement parce que la dette que les entreprises génèrent dépassera leur capacité à soutenir les marchés.

Cette énigme est également visible dans les mesures de relance des banques centrales. Comme je l’ai expliqué dans des articles antérieurs, la capacité des banques centrales à conduire le système financier mondial est chancelante, au fur et à mesure que le renflouement et les injections de capitaux à faible taux d’intérêt sont sans effet sur la performance économique globale. Le carburant à base de monnaie fiduciaire ne suffit plus, et quand cela deviendra évident dans les médias dominants, le ciel va leur tomber sur la tête.

L’argument que les banques peuvent soutenir le système à jamais est maintenant discrédité. Dans cette série d’articles, je vais en découvrir les raisons fondamentales, en commençant par la base de toute économie: l’offre et la demande.

Le Baltic Dry Index (BDI) a été un indicateur constant de l’économie réelle depuis de nombreuses années. Alors que la plupart des autres indices et des mesures de santé financière sont soumis à des manipulations directes ou indirectes, le BDI n’est pas traversé par des flux financiers et, par conséquent, offre un reflet plus honnête du monde qui nous entoure. Ces deux derniers mois, l’indice mesurant les tarifs d’expédition et la demande internationale pour les produits bruts est descendu à un plus bas historique, avec une chute de 57% au cours des 12 derniers mois et de 30% depuis le début de l’année.

Le demande déclinante pour le trafic maritime présente des défis évidents aux éditorialistes traditionnels qui prétendent que la situation économique globale indique une progression. Car si la demande de produits bruts a diminué de 57% au cours de la dernière année, alors sûrement la demande pour les biens de consommation utilisant ces même produits bruts a dû s’effondrer de la même manière. La machine de communication des autorités a utilisé le même argument éculé contre cette conclusion, malgré sa fausseté démontrée encore et encore: le mensonge est que la taille de la flotte est la cause de la baisse des taux d’expédition, plutôt que d’un manque de demande pour les navires. C’est le même argument utilisé par les experts pour détourner l’attention des problèmes inhérents à la forte baisse des prix du pétrole: que l’offre excédentaire est la vraie question, et que la demande est aussi bonne qu’elle l’a toujours été. Le magazine Forbes a même tenté de rejeter purement et simplement le manque d’ancienneté (29 ans) du Baltic Dry Index et le travail des analystes économiques alternatifs dans le même article écrit par dessus la jambe.

Tout d’abord, nous allons aborder la question de la demande mondiale de biens. Est ce que le BDI la représente avec précision? Eh bien, comme la plupart d’entre vous le savent, une vue objective sur la valeur des biens fabriqués et exportés est presque impossible à établir en considérant que la plupart des indices, sinon tous, ne tiennent pas compte de la dévaluation monétaire et de l’inflation des coûts de production. Par exemple, les propagandistes traditionnels aiment faire valoir que la fabrication (comme la vente au détail), est généralement soumise à des gains de productivité, même modestes, chaque année. Ce qu’ils omettent de mentionner ou de prendre en compte, ce sont les coûts ajoutés à la longue chaîne de ces fabricants et détaillants, ainsi que les coûts supplémentaires pour le consommateur final. Ces coûts ne sont souvent pas traités du tout, alors que les chiffres définitifs sont comptabilisés pour le public.

Dans le secteur manufacturier, certains chiffres sont carrément falsifiés, comme dans le cas de la Chine, où les autorités obligent les directeurs d’usine à mentir au sujet des sorties d’usine.

À mon avis, toute baisse rendue visible dans les faux chiffres exposés au grand public devrait être amplement réévaluée afin de se rapprocher de ce qui se passe dans l’économie réelle. La Chine, le plus grand exportateur et importateur du monde, continue de souffrir de baisses dans le secteur manufacturier en expansion, comme le suggèrent les commandes des PMI qui restent globalement stagnantes.

Les statistiques officielles montrent une baisse de 3,3% des exportations chinoises par rapport à janvier de l’année précédente, tandis que les importations ont chuté de 19,9%. Les exportations ont glissé de 12% sur une base mensuelle alors que les importations ont chuté de 21% selon l’administration des douanes.

Au Japon, malgré la chute du yen qui devrait stimuler la demande à l’étranger, la croissance des exportations a diminué pour l’année dernière, en termes de volume. Le sursaut récent en janvier ne fait rien pour compenser l’érosion régulière des exportations japonaises au cours des cinq dernières années et la demande stable des deux dernières années.

L’expansion de la fabrication du Japon a ralenti au rythme le plus lent depuis sept mois.

En Allemagne, le centre économique le plus fort de l’UE, la production industrielle est descendue à son niveau le plus bas depuis 2009, et les commandes d’usines ont également plongé à des niveaux jamais vus depuis 2009.

Malgré l’hypothèse des médias traditionnels que les prix du pétrole se traduiraient par des ventes au détail plus élevées, ce fantasme refuse de se matérialiser. Les ventes au détail continuent sur une tendance lugubre initiée par la saison de Noël 2014, avec la plus forte baisse en 11 mois en décembre, et cette baisse continue en janvier.

Le pétrole est certainement l’indicateur le plus visible de l’indéniable implosion de la demande. La volatilité a explosé alors que les prix à la pompe ont diminué de moitié dans de nombreux endroits. On peut être tenté de ne voir que les avantages immédiats à cette déflation. Mais ce serait oublier le tableau d’ensemble de la demande mondiale. Le pétrole est le principal moteur de la productivité économique. La diminution de la demande de pétrole signifie la diminution de la productivité qui entraîne la diminution de la consommation, et finalement dévoile une économie en déclin.

Les rapports de l’Opep annoncent une dégradation de la demande mondiale pour le pétrole au-delà des attentes. La demande de pétrole a chuté à des niveaux jamais vus depuis 2002.

Derrière la question de la demande mondiale réelle pour les produits bruts, l’argument que le BDI chute seulement en raison d’une offre excédentaire de navires porte-containers ne prend pas en compte le fait que les compagnies maritimes mettent souvent en réserve les navires en excédent lorsque la demande faiblit. Je trouve plutôt amusant que les économistes traditionnels semblent penser que les entreprises de transport de matières sèches continueraient d’aligner des cargos qu’ils n’utilisent pas, provoquant une baisse artificielle des taux de fret. Pour autant que je sache, ces entreprises n’ont pas pour habitude de porter atteinte à leurs propres bénéfices si elles peuvent l’éviter. Lorsqu’une offre excédentaire de navires se produit, les entreprises éliminent les bateaux non utilisés par la mise au rebut ou en cale sèche pour faire remonter le taux de fret à des niveaux rentables. Cela fonctionne souvent, à moins que ce ne soit la demande pour le transport de marchandises qui soit en question, pas le stock de navires.

Le démantèlement des navires a explosé en 2013 et n’a pas cessé depuis. En fait, COSCO, le transporteur de matière sèche a démantelé au moins 17 navires dans le seul mois de janvier et en démantèle constamment depuis au moins 2013. La tendance à la démolition est souvent passée sous silence par les expéditeurs ou présentée comme un effort de modernisation, mais le fait demeure que les entreprises de fret sont toujours sur une tendance à l’élimination des navires d’approvisionnement afin de maximiser les taux et les profits.

Enfin, le géant mondial du transport maritime Maersk Line admet maintenant ouvertement que le préjudice principal aux tarifs d’expédition, la raison pour laquelle le BDI est en baisse à des plus bas historiques, est liée à la baisse de la demande sur presque tous les marchés, le nombre de navire est secondaire.
Est-ce que la demande faiblissante résulte d’un manque d’utilisation de la flotte et donc d’une offre de transport excédentaire? Bien sûr. Cependant, ce jeu de la poule et de l’œuf que les économistes aux ordres du Système jouent avec le BDI doit cesser. La baisse de la demande pour les biens est la cause, le nombre de navires inutilisés la conséquence. Voila la réalité.

Une personne plutôt cynique pourrait souligner que toutes les statistiques ci-dessus émanent du cœur de la propagande des médias dominants, alors pourquoi faudrait-il en tenir compte? Je demanderais à cette personne de considérer le fait que la propagande ne cessant de se contredire, on peut trouver, entre les lignes, une certaine part de vérité.
Si la production est en expansion, même mineure, alors pourquoi les exportations à travers le monde sont-elles en déclin? Si le Baltic Dry Index est en baisse en raison d’un surplus d’offre de navire, alors pourquoi d’autres indicateurs de la demande chutent-ils en même temps, et pourquoi les grandes agences maritimes évoquent-elles le manque de demande? Vous voyez, c’est ce que les analystes alternatifs indépendants entendent par l’économie réelle; nous parlons de la déconnexion du réel dans les données des médias dominants, et nous essayons de discerner quelle part de ces données présente vraiment une cohérence. Les médias préfèrent que vous regardiez l’économie à travers un trou de serrure plutôt qu’avec une paire de jumelles.

Ensuite il faut se demander: quels sont les véritables bénéficiaires de ces oublis envers le public? Les multinationales, les financiers et les despotes politiques. Les multinationales et les gouvernements ne font que deux choses relativement bien – mentir et voler. L’une permet toujours l’autre.

L’oligarchie dominante a fait tout ce qui était en son pouvoir pour cacher la plus fondamentale des réalités économiques, à savoir la réalité de la disparition de la demande. Pourquoi? Parce que plus ils peuvent masquer la réalité de cette demande, plus ils peuvent voler le peu de richesse resté indépendant au sein du système, tout en conditionnant la population pour la prochaine grande escroquerie (l’escroquerie de la mondialisation et de la centralisation totale). A la fin de cette série, j’analyserai les nombreux avantages d’un effondrement de l’économie pour les élites.

Pour l’instant, je vais seulement dire que le programme de manipulation que nous avons vu depuis 2008 est clairement en train de changer. Ce fait de la baisse catastrophique de la demande devient évident. Cette baisse précède toujours un événement fiscal plus large. Le BDI ne peut pas imploser sans un dysfonctionnement plus grand sous la surface du système financier. Le pétrole, les exportations et la production ne s’effritent pas sans que le poids d’un grand désastre ne nous retombe dessus. Ces choses ne se déroulent pas dans le vide. Elles sont le flash d’irradiation précédant les retombées mortelle d’une bombe atomique financière.

Brandon Smith

A lire: Le Baltic Dry Index a son plus bas depuis 29 ans

1 commentaire:

  1. Selon un nuléro récent du Marin, la chute du BDI s'explique par la baisse massive des omportations de charbon de la Chine, -150 millions de tonnes (l'Allemagne a augmenté ses importations de charbon de 15 millions de tonnes)
    Cette chute peut etre due aussi a un repli vers le nucléaire, et autres énergies moins polluantes. La Chine met de nombreuses centrales nucléaires et hydrauliques en service

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