vendredi 23 octobre 2015

Réduire la techno-sphère, Partie III

Article original de Dmitry Orlov, publié le 20 Octobre 2015 sur le site Club Orlov
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr


Partie I, Partie II

Avant cette série d’articles, j’ai expliqué comment, aux États-Unis, des intérêts particuliers utilisent des technologies politiques pour maintenir la population dans l’ignorance. Nous avons également montré comment ces efforts finiront par échouer, soit par le biais de contradictions internes ou parce que les parasites finiront par tuer l’hôte. Nous allons maintenant tourner notre attention vers les technologies politiques utilisées par les États-Unis contre le reste du monde. Cela peut sembler une digression à la tâche de répondre à la question brûlante, à savoir comment apporter des changements sociaux afin d’éviter la catastrophe climatique, mais c’est nécessaire.






La longue liste des technologies politiques utilisées aux USA (Partie II) pour garder les Américains sous contrôle, nous a aidé à montrer à quel point ces technologies sont envahissantes et destructrices. Nous en sommes maintenant à trouver des moyens pour neutraliser ces technologies parce que les Américains ont échoué à le faire. Pour trouver des exemples de moyens efficaces afin de les neutraliser, nous devons regarder ce que les États-Unis ont tenté d’appliquer au reste du monde, et qui a échoué.

Peu importe la chance de l’Amérique d’être isolée géographiquement, d’avoir des ressources naturelles abondantes, d’avoir reçu cette manne gigantesque due à sa victoire [usurpée, NdT] dans la Seconde Guerre mondiale, plus la manne supplémentaire suite à l’effondrement soviétique, la chance devait fatalement tourner. En fait, dans une large mesure, c’est déjà le cas : de manière purement pratique, il est tout simplement impossible de continuer à fonctionner ainsi en faisant peu de cas de l’ensemble de la planète si vous continuez à piétiner aussi votre propre population. Les États-Unis ont moins de 5% de la population du monde, dont la moitié sont obèses, un tiers sous médicaments et un quart malades mentaux. Ils sont champions du monde des meurtres par armes à feu, pour les meurtres dus à des policiers et pour l’emprisonnement de la population. La moitié des enfants sont nés dans la pauvreté et un tiers dans des familles brisées et inexistantes. Plus d’un quart de la population en âge de travailler est au chômage définitif. Sans de gros efforts d’imagination, est-ce la description d’un groupe qui peut gouverner le monde?

En vérité, au-delà de la simple question de la fin de ces bonnes (ou, si vous préférez, diaboliques) choses, le reste du monde a développé certains anticorps efficaces contre les technologies politiques américaines, et certains d’entre eux peuvent être utiles dans la réalisation des rapides changements sociaux qui sont nécessaires afin d’éviter une catastrophe climatique. Avant que l’Empire américain ne soit balayé par une vague de confusion et d’embarras, nous devrions être en mesure d’en extraire quelques leçons utiles.

Nous pouvons diviser les technologies politiques que les États-Unis utilisent contre le reste du monde en trois grandes catégories. Bien que les deux premières peuvent ne pas impliquer la violence physique de manière manifeste, du moins pas à chaque fois qu’elles sont appliquées, les trois catégories sont en fait des formes de la guerre hybride.
  1. L’escroquerie aux prêts internationaux
  2. Le Syndicat des Révolutions oranges
  3. Le terrorisme par procuration
John Perkins décrit l’escroquerie aux prêts internationaux dans son livre Les Confessions d’un assassin financier:
Les tueurs à gages économiques (assassins financiers) sont des professionnels très bien payés qui escroquent les pays à travers le monde pour des milliards de dollars. Ils dirigent l’argent de la Banque mondiale, de l’Agence américaine pour le développement international (USAID), et d’autres organisations étrangères d’aide vers les coffres des multinationales et les poches de quelques riches familles qui contrôlent les ressources naturelles de la planète. Leurs outils incluent des rapports financiers frauduleux, des élections truquées, des pot de vin, l’extorsion, le sexe et l’assassinat. Ils jouent un jeu vieux comme l’Empire, mais qui a pris des dimensions nouvelles et terrifiantes en ces temps de mondialisation.
Ces efforts aboutissent à un pays en faillite qui est incapable de payer le service de sa dette extérieure. Alors que dans les époques antérieures, les États-Unis utilisaient la diplomatie de la canonnière pour extorquer de l’argent en provenance de pays mauvais payeurs, dans un environnement économique mondialisé, c’est devenu en grande partie inutile. Au lieu de cela, la simple menace de refuser de fournir des liquidités aux banques du pays suffit pour le faire capituler. À son tour, la capitulation conduit à l’imposition de l’austérité : la santé, l’éducation, l’électricité, l’eau et les autres services publics sont soit coupés soit privatisés et achetés à bas prix par des intérêts étrangers ; l’épargne privée est confisquée pour effectuer des paiements symboliques payant une dette extérieure stratosphérique ; les subventions et les tarifs sont modifiés au profit des pays du G8 au détriment du pays lui-même, et ainsi de suite. La société s’effrite ; les jeunes et toutes les personnes de talent ou instruites tentent d’émigrer, laissant derrière eux les vieux démunis, les sans-espoir et les prédateurs sociaux.

Cette technologie politique a été un grand succès très récemment, avec la Grèce, le Portugal et l’Irlande. Mais il y a encore des pays qui, bien intégrés dans l’économie mondiale, sont politiquement en mesure de résister à ce mastodonte et insistent sur le maintien de leur souveraineté et la poursuite d’un ensemble de politiques indépendantes du diktat de Washington. Dans ces cas, les États-Unis déploient une technologie politique différente, qui porte le nom de Révolution orange (bien que les couleurs réelles varient). Cette technologie utilise des groupes de manifestants non violents pour créer un tumulte social, une désorganisation et une désintégration, pour rendre les élites politiques de ces pays impuissantes, et pour exploiter ce moment de chaos et de confusion dans le but d’installer un régime fantoche qui peut être contrôlé à partir de Washington.

Les méthodes de la Révolution orange sont souvent considérées comme un moyen non violent pour provoquer un changement de régime. Gene Sharp, le grand théoricien de la révolution non violente, insiste pour que toute protestation soit non violente. Mais le concept de non-violence, s’il est réconfortant pour les esprits délicats, doit être mis de côté parce qu’il n’existe tout simplement pas : si une foule ne jette pas de cocktails Molotov sur la police tout en bloquant illégalement les accès à un bâtiment public, cela ne la rend pas non violente. Tout d’abord, l’utilisation d’une foule dans un but précis est déjà une forme d’usage de la force. Deuxièmement, si la manifestation est illégale, et si rétablir l’ordre public exige la violence, alors la foule retourne la menace de la violence contre elle-même vers l’État de droit. L’appel à une telle non-violence de la foule équivaut à déclarer qu’un homme présentant ses exigences en pointant une arme sur sa propre tête n’est pas violent simplement parce qu’il n’a pas encore fait feu.

Les architectes du changement de régime insistent sur l’utilisation de tactiques non violentes spécifiquement parce qu’elles posent un problème beaucoup plus épineux pour les autorités que la révolte pure et simple. Si le gouvernement est confronté à un soulèvement armé, il sait exactement ce qu’il faut faire : le mettre par terre. Mais lorsque la jeunesse de la nation défile avec des T-shirts assortis (qui ont été mystérieusement expédiés de l’étranger) en criant des slogans délibérément anodins, ambitieux, et que l’ensemble du happening prend l’air d’un festival, alors la capacité du gouvernement à maintenir l’ordre public fond peu à peu.

Lorsque les conditions sont réunies, les changeurs de régime utilisent des mercenaires snipers, pour provoquer un massacre indifférencié et en jeter le blâme sur le gouvernement. Ces tireurs d’élite sont apparus en Égypte en 2011 pendant l’effort pour renverser Hosni Moubarak. Ils sont également apparus à Vilnius en 1991 puis à Moscou en 1993 [et à Kiev en 2014, NdT]. Ceux de Tunis, en 2011, sont actuellement détenus. Ils avaient des passeports suédois et des visages d’Europe du Nord. Ils ont dit qu’ils étaient là pour chasser le sanglier sauvage, avec des fusils de sniper, à Tunis.

Ne nous laissons pas induire en erreur : les trois types de technologies politiques que les États-Unis ont utilisées contre le reste du monde sont des formes de guerre hybride, et la guerre non violente est un oxymore. Le terme non-violence est impropre ; si on se réfère aux Révolutions orange, le terme correct est utilisation différée de la violence.

Ce qui transparaît pendant une révolution orange est typiquement organisé comme suit :

Phase 1 : fondements. L’action est initiée par un petit groupe d’individus de l’élite, idéologiquement et politiquement unifié en réseau et sponsorisé par des ONG de Washington, des think tanks et le Département d’État des États-Unis. Leur objectif est de figurer face au gouvernement comme la voix du peuple et face à la population comme les autorités légitimes. Ils utilisent des méthodes de guerre de l’information : grèves de la faim, petites manifestations, discours de dissidents et affrontements symboliques avec la police face à laquelle les manifestants jouent à la victime [Triangle de Karpman, Ndt]. Pour masquer le fait qu’ils ne sont qu’une petite clique impénétrable d’agents de l’extérieur et d’étrangers à la solde de Washington qui conspirent pour renverser le gouvernement, ils se fondent dans de grands groupes populaires de citoyens, infiltrent des mouvements de protestation légitimes, et injectent leurs slogans spécifiques aux côtés des demandes publiques populaires. Une fois qu’ils atteignent une majorité virtuelle et accumulent suffisamment de partisans pour les faire marcher pour une séance photo qui servira aux médias occidentaux pour en faire les champions d’un mouvement de protestation populaire, alors ils passent à l’action…

Phase 2 : destruction de l’ordre public. Durant cette phase, l’objectif est de parvenir à des perturbations sociales maximales grâce à des moyens non violents. Des rues et des places publiques sont occupées par des foules presque parfaitement pacifiques de jeunes scandant des slogans modérés, populaires. Ils commencent par l’organisation de manifestations sanctionnées officiellement, puis commencent à sonder les limites du gouvernement en changeant le parcours des manifestations ou par la tenue de réunions plus longues que prévues. Ils commencent à utiliser des stratagèmes tels que des sit-in accompagnés par l’annonce d’une grève de la faim illimitée. Tout en faisant cela, ils font de la propagande activement autour des policiers anti-émeutes, exigeant qu’ils ne fassent qu’un avec les gens en essayant de les forcer à devenir complices dans les premières transgressions mineures contre l’ordre public. Quand ce processus suit son cours, l’ordre public se désintègre progressivement.

Pendant cette phase, il est important que les manifestants ne se livrent à aucune sorte de dialogue politique significatif, parce que ce dialogue pourrait aboutir à un consensus national sur les questions importantes, et le gouvernement pourrait alors redevenir le champion, restaurer sa légitimité aux yeux du peuple tout en sapant la puissance des mouvements de protestation. Les changeurs de régime poursuivent la stratégie inverse : délégitimer le gouvernement par la prolifération de toutes sortes de conseils et de comités qui sont ensuite présentés comme démocratiques, et donc légitimes, des solutions de rechange au gouvernement.

Le temps des élections est un moment particulièrement opportun à exploiter pour les changeurs de régime en prétendant qu’il y a eu fraude dans les urnes et en utilisant les organisations sociales qu’ils ont infiltrées pour faire front commun afin de prétendre parler au nom de la véritable majorité. La Révolution du ruban blanc de la place Bolotnaya (marais) à Moscou le 6 mai 2012, juste avant que Poutine ne soit ré-élu en tant que président, n’a rien donné. Dans ce cas, les changeurs de régime se sont cassé les dents, et leurs agents locaux des mouvements d’opposition sont maintenant parmi les personnes les plus largement méprisées en Russie. (De façon amusante, les petits rubans blancs qui avaient été expédiés en Russie juste à temps pour cette action ont également été portés par les collaborateurs des nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, quelque chose que de nombreux Russes savaient alors que les marionnettistes étrangers derrière ces fausses manifestations ne le savaient pas.) C’est presque la même technologie qui a fait le travail plus tard au cours de la Révolution de l’Euro-Maïdan à Kiev en février 2014.

Lorsque les personnes chargées de la protection de ce qui reste de l’ordre public sont trop usées pour pouvoir réagir avec force au moment où la situation l’exige, le décor est planté pour…

Phase 3 : occupation. Au cours de cette phase, qui, si elle est efficace, est assez courte, les manifestants prennent d’assaut et occupent un bâtiment public symboliquement important. C’est une tactique révolutionnaire très traditionnelle, remontant à la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, ou à la prise du Palais d’Hiver, le 7 novembre 1917. Si les préparatifs ont réussi, à ce moment, le gouvernement est dans un conflit interne trop important pour agir ou les défenseurs de l’ordre public sont trop démoralisés pour suivre les ordres du premier ou alors les deux, de concert. Dans certains cas, comme en Serbie, en Géorgie et au Kirghizstan, tout cela permet de passer directement à la phase 5. Les personnes très organisées derrière le blitz [coup de main, NdT] prétendument spontané peuvent maintenant se déclarer comme gouvernement légitime, et peuvent exiger que le véritable gouvernement leur obéisse et démissionne. Cependant, parfois, ça ne marche pas, dans ce cas, il est toujours possible…

Phase 4 : le massacre. Des snipers sont pilotés et introduits dans les étages supérieurs des bâtiments publics donnant sur les places des villes où les rassemblements et les manifestations se tiennent. A ce moment là, les défenseurs de l’ordre public sont suffisamment démoralisés par leur inaction face à des défis de plus en plus élevés de la part des manifestants que quelques-uns d’entre eux peuvent être facilement corrompus par de gros pots de vin des sponsors étrangers de cette opération de changement de régime. Ils acceptent de l’argent et quittent la scène, laissant les portes déverrouillées ou même en ayant remis les clés. Les mercenaires vont passer à l’action et tuer une centaine de personnes. Les médias occidentaux vont exprimer immédiatement une forte indignation, attribuant la responsabilité du massacre au gouvernement, et exigeant qu’il démissionne. Les manifestants sont incités à faire écho immédiatement à ces slogans et une vague d’indignation balaie le gouvernement hors du pouvoir, ouvrant la voie au…

Phase 5 : changement de régime. Le nouveau gouvernement, téléguidé par l’ambassade des États-Unis et le Département d’État américain, prend le pouvoir, et est immédiatement reconnu par Washington qui lui apporte son soutien.

Cette stratégie peut avoir déjà réussi à ce moment-là. Comme nous le verrons, la société peut parfois développer des anticorps efficaces contre elle. Il est à noter que presque tout gouvernement, du plus démocratique au plus autocratique, est susceptible d’y être sensible, les seules exceptions étant les monarques absolus qui peuvent faire rouler des têtes dès que quelqu’un commence à parler sans y être invité, ou les dirigeants qui tirent leur légitimité d’un droit divin qui ne peut pas être remis en cause sans commettre un sacrilège.

Le gouvernement n’a pas de bonnes options tactiques. Il ne peut pas déclarer la masse des manifestants hors la loi, car ils sont, après tout, ses citoyens, et la plupart d’entre eux ne sont même pas directement coupables de toutes les transgressions administratives. Mais s’il veut rétablir l’ordre public, il doit sévir contre les manifestants. S’il réprime très tôt, alors cela semblera trop ferme et autoritaire, donnant des munitions au mouvement de protestation. S’il réprime à la hauteur des protestations, alors cela provoquera beaucoup de pertes inutiles, tournant une grande partie de la population contre lui. Et s’il tente de sévir quand il est trop tard, il finira par être vu comme encore plus faible, accélérant sa propre disparition.

Mais le gouvernement dispose d’une excellente option stratégique, à condition qu’il en jette les bases à l’avance. Le problème pour s’opposer à ce genre d’opération de changement de régime soi-disant non violente, téléguidée de l’extérieur, est qu’elle ne peut être efficacement combattue par un gouvernement. Mais elle peut être très efficacement combattue et perturbée par un groupe relativement restreint de personnes habilitées agissant directement et de manière autonome au nom du peuple. Tel est le thème que nous allons aborder.

Nous ne discuterons pas de la troisième méthode de changement de régime, le terrorisme par proxy parce que, franchement, ça ne fonctionne pas. On en est encore à essayer d’installer un régime fantoche stable dans tous les pays où cette méthode a été essayée. Elle a échoué en Afghanistan : après que les Soviétiques se sont enfin retirés, le pays est devenu un État défaillant. Le terroriste des marionnettes de l’Amérique, appelé al-Qaïda, a ensuite été utilisé comme leurre pour justifier l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, mais les leurres sont revenus à la vie et menacent de déstabiliser la région.
Le dernier groupe des terroristes, jouets de l’Amérique, ISIS – qui, en ce moment, sont tellement impressionnés par la campagne de bombardements russes qu’ils se rasent la barbe et fuient – sont devenus un énorme embarras pour les États-Unis. Le terrorisme par procuration ne produit, à coup sûr, que des États défaillants, et bien que certains puissent prétendre que c’est un objectif raisonnable comme finalité d’une politique étrangère, il est très difficile d’argumenter que c’est optimal, même à minima.

Dans un sens, ceci est un requiem pour ces trois technologies politiques.

La première, les prêts usuraires internationaux, ne semble plus fonctionner aussi bien que par le passé. Les pays en développement peuvent désormais emprunter à l’infrastructure asiatique de la banque d’investissement chinoise, dans laquelle ils peuvent devenir actionnaires. Des pays à travers le monde se débarrassent de leurs réserves en dollars et concluent des accords commerciaux bilatéraux qui contournent le système du dollar. En grand désarroi avec leurs propres finances, les États-Unis ne sont plus en mesure de fonctionner en tant que pourvoyeur de stabilité financière.

Les Révolutions orange ont aussi largement usé leur dynamique, parce que la technologie politique pour les neutraliser est maintenant assez bien maitrisée. Le dernier effort à grande échelle, en Ukraine en 2014, a abouti à un État défaillant. Les efforts ultérieurs à Hong Kong et en Arménie ont fait long feu.
Enfin, le terrorisme par procuration non seulement n’a jamais fonctionné correctement, mais est maintenant un poison extrêmement embarrassant pour les politiciens de Washington. Les Russes, avec l’aide syrienne, iranienne et irakienne, sont rapidement en train de liquider les animaux de compagnie terroristes de l’Amérique avec équité et équilibre, tandis que leurs anciens marionnettistes à Washington sont visiblement démoralisés et débitent des non-sens grotesques. Mais il y a encore quelques leçons importantes à tirer de tout cela, et nous devons les tirer avant que tout ne se recouvre d’une épaisse couche de poussière.

Dmitry Orlov

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