jeudi 4 février 2016

Les États-Unis sont au centre de la crise économique mondiale


Article original de Brandon Smith, publié le 20 Janvier 2016 sur le site alt-market
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr


 
Alors que l’implosion économique progresse cette année, il y aura tromperie et désinformation considérable quant à la véritable nature de ce qu’il se passe. Comme je l’ai souligné par le passé, les masses ont été si mal informées par les médias dominants pendant la Grande Dépression [de 1929, NdT] que la plupart des gens n’ont su qu’ils étaient en fait au milieu d’une dépression officielle que des années plus tard.

 
Le chœur des journalistes économiques du jour s’arrange pour toujours faire valoir que la reprise est juste au coin de la rue. Notre dépression actuelle ne semble pas prendre un chemin différent, mais quelque chose est en train de changer.

Contrairement à la Grande Dépression, la crise sociale finira par éclipser la crise économique aux États-Unis. C’est-à-dire que notre société d’aujourd’hui est si peu préparée à faire face à un effondrement financier que l’événement déclenchera inévitablement un bouleversement culturel et un violent conflit interne. Dans les années 1930, près de 50% de la population américaine était rurale. Les agriculteurs composaient 21% de la population active. Aujourd’hui, seulement 20% de la population est rurale. Moins de 2% de la population travaille dans l’agriculture et à la ferme. Voilà un changement assez dramatique, avec le passage d’une société utilisant la terre de façon plus indépendante et compétente à un système basé sur la consommation, beaucoup plus impuissant et malheureux.

Qu’est ce que cela veut dire? Qu’environ 80% de la population actuelle des États-Unis est très probablement inexpérimentée quant à toute forme significative de production alimentaire et d’autosuffisance.

La raison des mensonges au public est certainement là. Les responsables économiques et politiques pourraient soutenir que révéler la vérité de notre situation budgétaire se traduirait par une panique totale et un effondrement social immédiat. Lorsque 80% de l’ensemble des citoyens n’est absolument pas préparé à une baisse de l’infrastructure courante, une perte de l’épargne avec la chute des actions et une perte de pouvoir d’achat par la destruction de la monnaie, leur première réponse à ces dangers sera, de façon prévisible, peu civilisée.

Bien sûr, le pouvoir en place n’est pas vraiment intéressé à protéger le peuple américain de lui-même. Les dirigeants ne sont intéressés qu’au positionnement de leurs propres finances et ressources dans les investissements les plus avantageux, tout en utilisant nos pertes et nos peurs pour mettre en place plus de centralisation, plus de contrôle et plus de consentement. Ainsi, cacher la réalité du déclin économique est entériné, car cette baisse elle-même est utile pour les élites.

Et seulement pour être bien clair avec ceux qui marchent dans la propagande, les États-Unis sont en effet en déclin rapide.

Dans Les mensonges que vous allez entendre alors que l’effondrement économique va progresser, publié l’été dernier, j’avais prédit que la contagion chinoise serait utilisée comme bouc émissaire de la crise afin d’en cacher la véritable origine : la destruction de la richesse américaine. Aujourd’hui, alors que les marchés comme le Dow Jones et d’autres chutent, et que les marchés pétroliers coulent en raison de la baisse de la demande et de la surabondance des stocks, tout ce qu’il nous semble entendre de la part des têtes parlantes des médias officiels et de leurs perroquets dans divers forums, c’est que les États-Unis sont «la seule économie stable comparativement» et que le reste du monde (principalement la Chine) est un poison pour notre santé financière, par ailleurs exemplaire. Cette fiction est délirante.

Les États-Unis sont le marché n°1 des consommateurs dans le monde avec une part globale de 29% et une part de 21% dans la consommation d’énergie, en dépit du fait que seulement 5% de la population totale du monde y vive. S’il y a un ralentissement mondial de la consommation, de la fabrication, des exportations et des importations, alors le premier endroit où regarder devrait être l’Amérique.

Le transport par camion aux États-Unis est en forte baisse, avec des entreprises de fret pointant deux coupables, une «surabondance des stocks» et une baisse de la demande.

La mise à jour des statistiques de transport de marchandises de Morgan Stanley indique un effondrement de la demande de fret pire que celle observée au cours de l’année 2009.

Le Baltic Dry Index, une mesure des taux de fret mondiaux et donc une mesure de la demande mondiale pour le transport de matières premières, s’est effondré à des niveaux encore plus sombres, historiquement bas. Des colporteurs dans les médias grand public continuent à pousser le mensonge que la baisse du BDI est due à une «surabondance de nouveaux navires». Cependant, le PDG de AP Moeller-Maersk, la plus grande ligne de transport maritime mondial, a mis cette absurdité à la poubelle quand il a admis en novembre que «la croissance mondiale ralentit» et que «le commerce est actuellement nettement plus faible qu’il ne devrait l’être avec les prévisions de croissance que nous lisons».

Maersk lie la baisse dans le transport maritime mondial à une chute de la demande, pas à une augmentation des flottes de navires.

Cela se confirme avec la situation interne quand on examine la carte MarineTraffic en temps réel, qui permet de suivre tous les cargos dans le monde entier. Pendant ces dernières semaines, la carte est restée presque complètement inactive, une grande majorité des cargos restant au port et ne voyageant pas à travers les océans pour livrer des marchandises. La réalité est que la demande mondiale est tombée dans un trou noir, et que les États-Unis sont en haut de la liste en termes d’effondrement des marchés de consommation.

Pour enfoncer le clou encore plus profondément, les États-Unis sont de loin le plus grand consommateur de pétrole au monde. Par conséquent, toute chute importante de la demande mondiale de pétrole devrait être fondée en grande partie sur une baisse de la consommation américaine. Les stocks de pétrole débordent maintenant, indiquant une chute inouïe de la consommation d’énergie et des achats.

La consommation de pétrole des États-Unis est en fait inférieure en 2014 à ce qu’elle était en 1997, et 25% en dessous des prévisions antérieures. Une grande partie de cette réduction de la consommation de pétrole a été attribuée au plus faible kilométrage parcouru par les véhicules. Bien que les marchés pétroliers aient subi des réductions de prix massives, le manque de demande a perduré en 2015.

Cet effondrement de la consommation se traduit partiellement dans les prévisions récemment ajustées du PIB du 4e trimestre par la Réserve fédérale, qui ont maintenant été sabrées avec une baisse de 0,7%.
Et rappelez-vous, la Fed et le gouvernement calculent les statistiques du PIB en comptant les dépenses du gouvernement faites avec l’argent des contribuables comme des productions ou du commerce. Ils comptent également des programmes parasites comme l’Obamacare dans le PIB. Si l’on devait supprimer de l’équation les dépenses du gouvernement faites avec l’argent des contribuables, le PIB réel serait largement dans le négatif. Cela veut dire, si les faux chiffres sont si mauvais, que les chiffres réels doivent être épouvantables.

Et enfin, nous allons parler de Wal-Mart. Il y a une bonne raison pour laquelle les experts traditionnels tentent de marginaliser l’annonce soudaine par Wal-Mart de la fermetures de 269 magasins, dont 154 d’entre eux sur le sol américain avec au moins 10 000 employés mis à pied. Si on admet la faiblesse de Wal-Mart, cela veut dire qu’il faut admettre la faiblesse de l’économie américaine, et cela, ils ne le veulent pas.

Wal-Mart est le plus grand détaillant d’Amérique et le plus grand employeur. En 2014, Wal-Mart a annoncé un vaste plan pour écraser partout le marché des épiceries de quartier avec ses magasins Wal-Mart Express, en en construisant des centaines en quelques mois. Aujourd’hui, ces magasins Wal-Mart Express sont massivement en cours de fermeture, en même temps que quelques supermarchés. Leur business modèle de secours aura duré environ un an avant d’être abandonné.

Certains dans la presse grand public soutiennent que ce ne sont pas nécessairement des signes de déclin économique, car Wal-Mart affirme qu’il aura construit de 200 à 240 nouveaux magasins dans le monde d’ici à 2017. Je trouve cela intéressant, car Wal-Mart vient de subir la plus forte baisse de son action depuis 27 ans en publiant des prévisions de vente en baisse de 6% à 12% pour les deux prochaines années.

Il me semble très peu probable que Wal-Mart ferme 154 magasins aux États-Unis (269 magasins dans le monde), pour ouvrir 240 autres magasins au moment d’une baisse prévue des ventes si importante qu’elle a causé la pire chute de l’action de l’histoire de la société. Je pense qu’il s’agit surtout d’une tentative des dirigeants de Wal-Mart d’apaiser les actionnaires avec des promesses d’expansion qu’ils ne prévoient pas de tenir.

Je peux annoncer ici et maintenant que la plupart de ces magasins ne verront jamais le jour et que Wal-Mart va continuer à réduire ses charges, soit en fermant des magasins, soit en licenciant des salariés, ou les deux.

Comme les données ci-dessus l’indiquent, la demande mondiale se désintègre; et les États-Unis en sont le facteur principal.

La meilleure façon de balayer tous ces indicateurs négatifs sous le tapis est de fabriquer quelque grande idée de menaces extérieures et de conséquences financières en cascade. Il est beaucoup plus facile pour les Américains de croire que notre pays est meurtri de l’extérieur plutôt que détruit de l’intérieur.
Est-ce que la Chine a des problèmes budgétaires considérables, y compris sur des questions de bulles de dette? Absolument. Est-ce que cela peut être un catalyseur pour l’effondrement global? Les problèmes de la Chine sont nombreux, mais s’il y a un premier domino dans la chaîne, alors c’est l’économie des États-Unis qui mérite cette distinction.

La Chine est le plus grand exportateur dans le monde, pas le plus grand consommateur. Un accident dans l’économie de la Chine n’est que le reflet d’un effondrement sous-jacent de la demande américaine pour les produits chinois (entre autres). Cela revient à dire que les cancres de la presse officielle doivent changer de paradigme; un accident en Chine n’est que l’annonce d’un effondrement plus important sur les marchés américains. Un accident en Chine est un symptôme d’une plus grande maladie budgétaire en Amérique. Les États-Unis en sont la cause principale; nous ne sommes pas la victime de la contagion chinoise. Et la crise aux États-Unis sera finalement bien pire en comparaison.

Comme je l’ai écrit dans Quelle nouvelle horreur pour l’économie après la hausse des taux de la Fed ?, publié avant Noël:
Les turbulences de marché sont garanties compte tenu du fait que les banques et les entreprises ont été totalement dépendantes des taux d’intérêt proches de zéro et du refinancement régulier par la Fed. Elles ont eu recours à ces prêts sans frais et à faible coût principalement pour des rachats d’actions, les leurs, afin de réduire leur nombre sur le marché, élevant ainsi artificiellement la valeur des actions restantes et faisant grimper le marché dans son ensemble. Maintenant que les prêts proches de zéro sont terminés, ces banques et ces entreprises ne seront pas en mesure d’emprunter comme avant, et les rachats cesseront. Ainsi, les marchés boursiers vont chuter à court terme.
Ce processus a déjà commencé avec une volatilité accrue avant et après la hausse des taux de la Fed. Observez les mouvements des marchés actions lors des deux premiers trimestres de 2016, ils seront beaucoup plus erratiques – 300 à 500 points ou plus – à la hausse et à la baisse plus fréquentes, avec une tendance générale entrainant la chute du Dow Jones dans la zone des 15 000 points. Des augmentations extraordinaires mais de courte durée vont se produire sur les marchés – Noël et le Nouvel An ont tendance à se traduire par des rallyes positifs – mais des rallyes, avec des chocs, sont tout autant un signe de volatilité et d’instabilité que des chocs accidentels.
Les marchés se sont immédiatement positionnés en territoire baissier alors que la nouvelle année a à peine commencé. Ce fut une prédiction facile à faire et que je réitère depuis des mois, tout comme le calendrier de la hausse des taux de la Fed était aussi une prédiction facile, basée sur l’histoire de la Fed, qui installe délibérément une instabilité croissante à cause de sa mauvaise politique alors que l’économie part dans des spirales déflationnistes. La Fed l’a fait au cours de la Grande Dépression et le fait encore aujourd’hui.

Ce n’est pas une coïncidence si les marchés mondiaux ont commencé à flancher après la première hausse de taux de la Fed. Le financement sans intérêt, au jour le jour, des banques et des grandes sociétés était la clé pour maintenir les actions dans une position relativement statique. Comme les États-Unis ont perdu la dynamique, le monde l’a aussi perdu. Comme la Fed en termine avec ses stimulations et ses manipulations pures et simples, le château de cartes tombe.

Je l’ai dit plusieurs fois et je vais le dire encore une fois. Si vous pensez que la motivation de la Fed est de prolonger ou de protéger l’économie américaine et sa monnaie, alors vous ne comprendrez jamais pourquoi elle prend les mesures politiques qui sont les siennes. Si vous comprenez et acceptez le fait que la Fed est un saboteur qui travaille soigneusement et progressivement à la destruction des États-Unis pour faire place à un nouveau système centralisé à l’échelle mondiale, tout se met en place.

Pour résumer, l’économie américaine, comme nous le savons, n’est pas planifiée pour survivre aux prochaines années. Lisez mon article Explications sur la fin du jeu économique pour plus d’informations de fond sur les raisons de cet effondrement préfabriqué et quel sont les objectifs ouvertement admis, y compris l’article de 1988 référencé dans The Economist, intitulé Soyez prêt à une monnaie mondiale en 2018, qui décrit le plan de réduction du dollar et du système américain afin de faire place à un panier de devises de réserve mondiale (droits de tirage spéciaux).

Il est étonnamment insensé de supposer que même si les États-Unis ont tenu le titre de roi des marchés de la consommation mondiale depuis des décennies, notre économie n’est pas, en quelque sorte, la pièce défectueuse principale dans le moteur économique mondial en cours de pulvérisation. Les économies sont en baisse parce que la demande est en baisse. La demande est en baisse parce que les Américains n’achètent plus. Les Américains n’achètent plus parce qu’ils sont fauchés. Les Américains sont fauchés parce que la politique de la banque centrale a créé un environnement de destruction de richesse. Cette destruction de richesse aux États-Unis était en cours, mais cela ne devient visible que seulement maintenant. La volatilité que nous voyons dans les pays en développement est dérisoire comparé au chaos financier auquel nous sommes maintenant confrontés. Quiconque tente de minimiser les dangers d’une démolition des États-Unis ou d’une menace pour un public non préparé est soit un idiot, soit il tente de détourner l’attention et de vous distraire de la réalité. Les prochains mois vont sans aucun doute permettre de le vérifier.

Brandon Smith

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